Atelier conso
suite au contre sommet d’Annecy

LE MANIFESTE

mercredi 1er octobre 2008

Manifeste d’Annecy

Les organisations paysannes, rurales, écologistes et de solidarité internationale, ainsi que tous les citoyens rassemblés ce 21 septembre 2008 à Annecy, adressent aux Ministres de l’agriculture de l’Union Européenne, venus ici débattre de la future PAC d’après 2013, le manifeste suivant. :

Manger chaque jour reste un besoin prioritaire pour tous. Or le droit à l’alimentation est méprisé : il est inacceptable qu’un milliard d’humains n’ait pas accès à une alimentation suffisante, saine et culturellement adaptée soit par pauvreté (qui n’épargne pas l’Europe), soit par manque d’accès à la production agricole. Des millions de paysannes et paysans, de ruraux sont poussés par la misère vers les grandes villes et l’émigration.

Dans l’Union Européenne (UE), une ferme disparaît chaque minute : pour la majorité des paysan(ne)s, la Politique Agricole Commune (PAC) actuelle ne permet pas de vivre dignement de son travail.

Alors que nous devons faire face aux changement climatique, à la crise énergétique, la disparition massive de la biodiversité, l’agriculture européenne développe encore des modes de production qui consomment trop d’énergie, d’eau, aggravent le réchauffement climatique et sont coûteuses pour le contribuable (santé, emploi, dépollution...)

Une autre politique agricole et alimentaire européenne est donc indispensable :

Que faire pour changer la Politique Agricole Commune ?

A l’heure du bilan de santé de la politique agricole européenne, l’UE doit considérer qu’elle a d’abord vocation à assurer l’alimentation de sa population, avant de prétendre nourrir le monde. Il ne s’agit pas d’un repli égoïste mais au contraire de permettre aux autres pays d’exercer leur droit de souveraineté alimentaire et de développer partout, au nord comme au sud, une agriculture paysanne et durable.

Pour assurer la sécurité alimentaire, pour préserver la planète, dynamiser le monde rural, l’agriculture doit être reconnue d’utilité publique. Les gouvernants doivent se fixer pour objectif le maintien de tous les paysans dans toutes les régions d’Europe. Il faut produire au plus près des consommateurs, afin de réduire les transports et d’améliorer la qualité des produits. Rappelons que l’UE est le premier importateur et exportateur de denrées agricoles et alimentaires : ce modèle est périmé.

Pour cela, le cadre international imposé aux politiques agricoles depuis les années 1990 par les règles de l’OMC doit être revu.

1. Les paysans veulent produire et vivre de leur travail

* Favoriser l’accès au métier La PAC et les politiques des Etats Membres doivent favoriser l’accès à la terre, à l’eau, au crédit, à des semences non appropriées par les firmes, à des intrants s’inscrivant dans des pratiques durables, ainsi qu’à une formation réorientée vers des modes de production durables. Les droits des paysannes doivent être respectés. * Des prix avant des primes Les prix de marché agricoles doivent être stables et suffisamment rémunérateurs pour la pérennité et le renouvellement des fermes. On ne peut baser une économie agricole sur la vente de produits à des prix en-dessous des coûts de production, comme cela est trop souvent le cas avec la PAC actuelle. Dans les régions défavorisées ayant des coûts de production plus élevés, des paiements directs plafonnés par actif sont nécessaires. * Réguler et protéger les marchés, mais en abandonnant le dumping Pour maintenir ces prix stables, il faut éviter les excédents ou les pénuries, donc avoir en amont des outils de maitrise des productions et de régulation. Il faut en même temps cesser le dumping de l’UE vers les pays tiers, c’est à dire nous abstenir d’exporter à des prix baissés artificiellement par des subventions (quelles qu’elles soient) et protéger le marché européen d’importations à trop bas prix par des droits de douane, lorsque cela est nécessaire. L’UE peut exporter ses produits spécifiques sans aide.

2. Préservons notre environnement

Donnons la priorité à des modes de production agricoles plus durables, plus autonomes, plus économes en intrants (engrais, pesticides,..) et en énergie. Il est inacceptable que la production animale à base d’herbe, favorable à la protection de sols, de l’eau, de la biodiversité et du climat, reçoive moins de soutien que les élevages basés sur le maïs et le soja ou que les cultures céréalières. Les prairies permanentes doivent être sauvegardées.

Accompagnons tous les agriculteurs dans cette direction par des mesures incitatives, et réorientons les organismes de développement agricole, l’enseignement et la recherche dans cette direction.

Maintenons et développons la biodiversité des plantes cultivées et des animaux d’élevage. Respectons les droits collectifs des agriculteurs de conserver, ressemer, échanger et vendre leurs semences reproduites sur la ferme. Interdisons les OGM .

Arrêtons le grignotage des surfaces cultivables par l’urbanisation, le développement d’agro-carburants industriels à rentabilité énergétique et économique douteuse.

3. Rapprochons producteurs et consommateurs

Les producteurs ont besoin de relations sécurisées, stables et équitables avec l’aval. Les formes réellement coopératives ainsi que les circuits courts producteurs-consommateurs doivent être favorisés.

Il faut freiner le développement d’oligopoles mondiaux et nationaux dans l’agro-industrie, la grande distribution, et l’alimentation. Réduire la domination de la grande distribution sur les transformateurs et les producteurs par un contrôle efficace des pratiques commerciales et des marges

Il faut promouvoir la consommation de produits locaux ainsi qu’une alimentation mieux adaptée à la santé humaine.

4. Sans souveraineté alimentaire, il n’y a pas de bonne politique agricole

L’Union Européenne doit agir auprès des Nations Unies pour une reconnaissance du droit de souveraineté alimentaire, qui permette aux Etats ou aux Unions de définir leur politique agricole et alimentaire, sans dommage vis-à-vis des pays tiers. Pour accompagner ce droit, il faut :

* reconnaître que la vocation première de l’agriculture est de fournir les marchés domestiques ; * permettre aux Etats ou groupes d’Etats à se protéger contre des importations de produits agricoles à un prix inférieur aux coûts de production locaux ; * autoriser les soutiens publics à une agriculture durable, à condition qu’ils ne servent pas directement ou indirectement à exporter à bas prix ; * assurer une stabilité des prix agricoles mondiaux en régulant les marchés.

Soigner la PAC dès le « bilan de santé » de 2008

L’Union Européenne doit rééquilibrer les paiements directs entre agriculteurs, notamment entre éleveurs et céréaliers, en les plafonnant par actif et en attribuant une prime forfaitaire aux plus petites fermes.

Elle doit soutenir mieux les secteurs fragilisés, notamment les productions à forte main-d’œuvre comme les fruits et légumes, le vin,.. , ainsi que la production ovine , abandonnée par la PAC actuelle.

Il est indispensable de maintenir et d’améliorer le système des quotas laitiers, ainsi que d’autres outils de régulation des marchés.

Pour retrouver l’autonomie de l’UE en protéines végétales (nous importons 75% de nos besoins !!) qui nourrissent nos troupeaux, la PAC doit d’urgence relancer la culture des protéagineux en Europe.

Les programmes de développement rural doivent donner la priorité à l’installation paysanne et à l’emploi rural, ainsi qu’au commerce local ou régional et à la transformation locale.

Nous appelons les gouvernements de l’Union Européenne à réorienter dès maintenant les politiques agricoles et les modes de production, pour répondre aux besoins des citoyens et aux défis mondiaux de ce siècle.

N’attendons pas 2013 !


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